Hiver et Eté

Les arcanes d'Elis Urièl sont sombres, profondes et mystérieuses.
On ne sait ce qui peut en sortir, et personne n'a jamais essayé de répertorier tout ce qu'elle contenait, car certains ouvrages apparaissent ou disparaissent avec le temps, ne se présentant qu'à de rares personnes ou se dissimulant à quelques refusés, sans qu'on sache exactement ni pourquoi, ni comment...
Venu des profondeurs du passé ou du futur, ce texte a été repêché par les scribes et traduit...
Nul ne sait si Elis Urièl nous envoie un message avec cette oeuvre ou si elle veut simplement nous faire profiter d'un texte magnifique...


Elle a relevé la tête et a défié son regard. Yeux gris et froids contre yeux verts, Hiver contre Eté, deux opposés qui pourtant avaient tout de suite été attiré un jour pluvieux de printemps.
Leur rencontre avait été fusionnelle. La glace qui entourait son cœur avait fondu sous la chaleur de son sourire. Il fut séduit instantanément. En seulement quelques secondes, elle lui avait apporté tant de lumière et de réconfort que ce jour là, il crut que son avenir ne serait plus jamais morose, que le désespoir s´était enfin envolé et que le bonheur avec elle serait magique...
Mais toute utopie doit prendre fin et leur insouciance ne dura que peu de temps, juste trois mois, juste le temps d´une saison, le temps que la passion et le désir s´étiolent et se meurent, lentement, petit à petit, inexorablement comme un feu follet.
Et en ce matin d´automne, pour la première fois, il a levé sa main sur elle. Une gifle, un coup qui a laissé sa trace sur sa joue, à présent marquée par l´empreinte d´une chevalière .
Elle a porté la main à son visage, a relevé les yeux et s´est tue. Il ne fallait pas qu´elle pleure, ni qu´elle montre ses faiblesses. Et ses yeux gris, ses yeux qui la fixaient, implacables, sans une once de pitié pour celle qu´il avait autrefois aimé, caressé, embrassé…
Mais plus jamais il ne ferait ça, elle se le promis. Il était juste énervé, et puis c´était de sa faute, elle le provoquait toujours.
Lui se tenait face à elle, il se sentait puissant, supérieur, après tout, l´Hiver domine toujours l´Eté, et c´était tellement jouissif de se sentir fort par rapport à cet Etre si faible et si lâche.
Et elle, continuait de le toiser, elle, l´Eté, droite et fière mais tremblante de froid et de peur dans sa petite robe d´automne.
Il releva la main sur elle, et la frappa à nouveau avec une violence non retenue. Elle le laissa faire, sans un mot, convaincue que c´était la dernière fois, convaincue qu´il l´aimait encore, et qu´il ne se rendait pas compte de ce qu´il faisait. Après tout, s´il l´avait vraiment voulu, il l´aurait abandonnée depuis longtemps.
Une pensée, une larme, la vie n´est pas si juste, pourquoi cet amour sans aucun retour ? Elle avait beau se demander pourquoi, personne ne lui répondait, elle était seule, tellement abandonnée, et ses questions restaient sans réponses, la laissant dans un désarroi total, dans une nuit noire et sans fin, perdue entre rêves et réalité.
Le temps passait. Il continuait à la battre, elle continuait à se taire et l´ Ete touchait à sa fin. Elle se sentait dépérir, elle fanait, elle le savait, sa vie sans lui n´était rien, et lui était tout sans elle. Cruelle ironie du sort, c´était lui qui avait eu besoin d´elle en premier et aujourd´hui, c´était elle qui était dépendante de lui, comme une fleur a besoin de soleil pour s´épanouir...
De cette histoire d´amour perdue, l´Ete en mourrut, l´Hiver en sortit gagnant et la vie continua...